Pas de transaction, pas de commission.

Il est extrêmement fréquent que, d’une part, un bien immobilier soit financé à crédit et que, d’autre part, un agent immobilier concoure à l’opération immobilière en question.

De manière tout aussi générale, l’obtention du crédit constitue une condition suspensive de réitération de la vente.

A défaut pour l’emprunteur d’obtenir ce crédit auprès d’un ou plusieurs établissements bancaires, aux conditions (taux, durée, garanties, délai,) figurant au compromis de vente, il peut valablement se défaire de son engagement d’acquérir le bien en question et récupérer le dépôt de garantie généralement convenu.

Le candidat acquéreur ainsi dégagé ne peut donc se voir demander paiement de la commission de l’agent immobilier étant intervenu dans l’opération.

Mais qu’en est-il si la demande de prêt n’est pas présentée ou n’est pas présentée de manière conforme à ce que le compromis prévoyait et que pour autant l’acquéreur renonce précisément à acquérir le bien ?

L’agent immobilier a-t-il droit à sa rémunération ?

La réponse de principe est non.

La Loi du 2 janvier 1970 applicable en la matière est, en effet, particulièrement claire : aucune commission ni somme d’argent quelconque ne peut être exigée par l’agent immobilier ayant concouru à une opération qui n’a pas été effectivement conclue.

La solution peut paraître rude pour l’agent immobilier qui a bien accompli sa mission mais qui se voit privé de rémunération, alors que l’acquéreur n’a pas respecté l’obligation qui était la sienne de solliciter le crédit prévu au compromis et qu’il n’y est strictement pour rien…

C’est pourquoi il est possible pour l’agent immobilier de solliciter en Justice des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la non réalisation de la vente, si celle-ci est imputable au candidat acquéreur.

Quelle est la différence avec le paiement de la commission ?

Elle est de taille.

La commission rémunère de manière forfaitaire la tâche accomplie par l’agent immobilier et elle est assez fréquemment proportionnelle à la valeur du bien immobilier.

Les dommages et intérêts, quant à eux pour être fixés à une somme déterminée, supposent que l’agent immobilier rapporte la preuve d’une faute du candidat acquéreur (il n’a pas déposé de demande de prêt dans les délais par exemple) mais aussi la preuve d’un préjudice subi du fait de cette faute qui doit avoir directement empêché la réalisation de la vente.

C’est beaucoup moins simple

Où est le préjudice si le bien à fait l’objet d’une vente quinze jours plus tard au profit d’un tiers mis en contact avec le vendeur par le même agent immobilier ?

Où est le préjudice si le candidat acquéreur démontre que même en ayant présenté la demande dans les délais (pour reprendre notre exemple), le prêt n’aurait pas été accordé ?

A supposer même que la faute existe et qu’elle soit bien à elle seule à l’origine de l’absence de vente, il reste donc bien à apprécier le préjudice qui ne peut donc être égal au montant de la commission perdue.

La Cour de Cassation est ainsi particulièrement vigilante sur l’application des dispositions d’ordre public de la Loi de 1970.

Au mois de juillet 2014, elle a, par exemple, retenu que le fait de prévoir au compromis une clause pénale indemnisant la perte de rémunération subie par l’agent immobilier du fait de la non réalisation de la vente en raison d’une faute du candidat acquéreur ne constituait, en fait, qu’un détournement de l’interdiction de percevoir une commission ou une quelconque somme d’argent en cas de non réalisation de la vente.

De même, par un récent arrêt du mois de février 2015, elle a réaffirmé que, quand bien même la vente ne s’était pas faite, en raison d’une faute du candidat acquéreur qui ne pouvait, par ailleurs, librement se dédire, l’agent immobilier ne pouvait recevoir l’équivalent de sa commission même rebaptisée « dommages et intérêts », puisque précisément leur montant était égal à ladite commission.

Face à une telle situation, il est donc tout particulièrement important d’être vigilant au fondement juridique de la demande présentée.

En cas de doute, faites-vous défendre.