Etre propriétaire n’empêche pas d’être surendetté.

Jusqu’à une Loi de juillet 2013, toute personne se considérant comme surendettée et qui s’adressait à une Commission de surendettement pour obtenir la protection de la Législation applicable en la matière, alors qu’elle était propriétaire de sa résidence principale, s’exposait à un rejet de sa demande.

Il était, en effet, considéré que le fait d’avoir ce statut de propriétaire interdisait de caractériser un état de surendettement.

Certes, encore fallait-il que la valeur du bien en question soit au moins égale ou supérieure à l’ensemble des dettes du débiteur pour que sa vente permette de désintéresser la totalité des créanciers, tout en permettant audit débiteur de supporter le coût d’un relogement (en location, évidemment).

Pour autant, certaines Commissions de surendettement et certains Tribunaux, sur recours formés contre des décisions desdites Commissions, allaient plus loin en exigeant que le bien immobilier même évalué en deçà du montant total des dettes souscrites, soit vendu avant d’examiner la manière de régler, dans le cadre d’un plan de surendettement, le sort des dettes résiduelles en tenant compte d’un « reste à vivre » intégrant le coût d’un loyer.

La solution pouvait paraître quelque peu sévère pour des débiteurs dont l’endettement ne résultait pas par principe de leur mauvaise foi, à défaut de quoi leur demande aurait de toute façon été rejetée.

La Loi du 26 juillet 2013 est depuis intervenue et désormais le seul fait d’être propriétaire de sa résidence principale et que sa valeur soit égale ou supérieure aux dettes exigibles ne peut à lui seul interdire au débiteur de se voir déclarer en situation de surendettement.

Si une Commission ou un Tribunal entend refuser le bénéfice du statut de surendetté au débiteur, il conviendra donc de démontrer en quoi ce surendettement n’existe pas, nonobstant le fait que celui-ci soit propriétaire de sa résidence principale.

Cette loi est d’application immédiate, ce qui implique que les dossiers en cours à la date de sa publication et dans le cadre desquels cette situation se présente doivent être traités à la lumière de ses dispositions.

La Cour de Cassation vient de le confirmer au travers d’un arrêt rendu au mois de février 2015.

Dans un autre arrêt rendu le même jour, la Cour se montre extrêmement sévère sur la motivation pouvant être retenue par une juridiction rejetant la demande du bénéfice du surendettement.

Dans l’hypothèse qui lui était soumise, la Cour a relevé que le Tribunal, pour considérer que le débiteur n’était pas surendetté, avait constaté qu’il était propriétaire, qu’il avait analysé ses ressources et charges, qu’il avait souligné que la vente du bien permettait de désintéresser tous les créanciers et que le relogement ne poserait pas de problème, puisque les revenus diminués des charges fixes le permettait.

Pour autant et malgré ces constats, la Cour de Cassation a annulé cette décision au motif de principe que : « (…) le seul fait d’être propriétaire de sa résidence principale et que la valeur estimée de celle-ci à la date du dépôt du dossier de surendettement soit égale ou supérieure au montant de l’ensemble des dettes exigibles et à échoir ne peut être tenu comme empêchant que la situation de surendettement soit caractérisée ».

Au regard du fait que la juridiction de première instance avait pris soin de détailler, précisément et complètement, l’ensemble des autres éléments lui permettant de ne pas accueillir la demande du débiteur, au-delà même du statut de propriétaire d’un bien de valeur équivalente aux dettes, et que l’on perçoit mal ce qu’elle aurait pu retenir de plus, il semble bien que la Cour de Cassation entende poser en principe que tout un chacun (de bonne foi) propriétaire ou non de sa résidence principale, et quelle qu’en soit la valeur est admissible au bénéfice de la législation sur le surendettement.

Il s’agit là indiscutablement d’un progrès pour des débiteurs malheureux qui ont avant tout subi leur surendettement.