Deux années peuvent être longues ou courtes.
En matière de crédit à la consommation elles sont longues pour l’emprunteur et courtes pour le prêteur.
C’est, en effet, dans le délai de deux ans après le premier incident de paiement non régularisé que le Banquier doit saisir le Tribunal d’Instance afin d’obtenir la condamnation de l’emprunteur à payer ce qu’il reste lui devoir au titre du crédit.
S’il n’agit pas dans ce délai, il encourt la forclusion, c’est-à-dire qu’il ne pourra plus contraindre juridiquement le débiteur à payer.
Reste à savoir ce qu’est un » incident de paiement non régularisé « .
Évidemment, on pense en tout premier lieu à une mensualité de crédit impayée.
Il s’agit bien là d’un incident de paiement qui, s’il n’est pas régularisé, par la suite constitue le point de départ du délai de deux ans à l’issue duquel le débiteur ne pourra plus être poursuivi.
Ce n’est pas la seule hypothèse.
Ainsi, en présence d’un crédit renouvelable dit aussi » crédit revolving « , le point de départ du délai de forclusion peut également se situer au jour où le montant de la » réserve » de crédit telle que fixée au contrat est dépassée.
Il arrive que le prêteur consente à ce dépassement voir augmente de sa propre initiative le montant maximum du crédit accordé.
Toutefois, si cette augmentation ne donne pas lieu à l’établissement d’une nouvelle offre de crédit écrite et signée par l’emprunteur, la Cour de Cassation considère (et elle le rappelle très régulièrement) que cela n’est pas de nature à régulariser l’incident de paiement que constitue le dépassement du montant de crédit initialement accordé.
Il en résulte que deux ans après cet incident de paiement, le prêteur ne pourra plus engager d’action en justice contre le prêteur pour réclamer le paiement du solde de son crédit.
Oui, mais
Cela ne signifie pas pour autant que la dette est éteinte.
Avec un grand sens de la subtilité le Législateur a prévu que le créancier ne peut plus obtenir de condamnation à payer du débiteur sans que pour autant sa créance disparaisse.
Concrètement le banquier ne peut contraindre son client à payer parce qu’il ne dispose pas d’un jugement de condamnation à paiement susceptible de faire l’objet d’une mesure d’exécution par un Huissier (saisie de meubles, saisie sur salaires, etc) mais la somme restant due au titre du crédit reste due.
Le débiteur peut donc spontanément payer cette somme, que personne ne peut le contraindre à régler.
Le cas n’est pas rare.
Écartons l’hypothèse dans laquelle un haut sens » moral » pousse le débiteur a priori en difficulté (à défaut de quoi, il aurait continué à régler son crédit) à se faire un point d’honneur à régler le solde dû.
Non seulement la fréquence de ce type d’attitude est exceptionnelle, mais elle est en outre totalement vaine puisque les paiements réalisés vont d’abord être imputés sur les intérêts dus avant d’amortir le capital et la dette ne va donc pas diminuer mais augmenter…
En revanche l’hypothèse dans laquelle le débiteur finit par régler parce qu’une société de recouvrement de créances le relance, jour et nuit, à son domicile, sur son lieu de travail, contacte ses voisins et sa famille, par téléphone, par mail, par courrier est plus que fréquente.
Certes, on l’a vu, la créance n’est pas éteinte et il est donc possible pour le créancier de tenter d’en obtenir le paiement hors procédure judiciaire en confiant son recouvrement à une telle société.
Pour autant, la limite de l’exercice est le harcèlement qui n’est en définitive guère difficile à établir.
Récemment, un Tribunal d’Instance breton a (encore) condamné une société de recouvrement de créances qui agissait de la sorte à verser des dommages et intérêts au débiteur ainsi harcelé et lui a interdit sous astreinte de réitérer semblable attitude.
La société de recouvrement n’a pas fait appel du Jugement.
La leçon est simple : refusez de payer et faites vous défendre !